
AVIS d’Europe Écologie Les Verts – Nord-Pas-De-Calais concernant l’installation d’une unité de fabrication de batteries à Douvrin.
Suite aux différentes études faites dans le cadre de la concertation réalisée en 2020 et 2021, voici l’Avis d’EELV – NPDC dans le cadre de l’enquête publique en cours (06 septembre au 08 octobre 2021).
En préambule, nous tenons à rappeler la position d’EELV concernant le développement des véhicules électriques :
L’électrification des flottes automobiles est en développement extrêmement rapide et il y a maintenant toutes les raisons de penser qu’une partie importante du parc sera électrique dans la décennie à venir.
En dehors des zones denses où il faut à tout prix réduire voire même tout simplement supprimer la voiture individuelle, cette évolution vers la voiture électrique est une bonne chose du point de vue environnemental : réduction du bruit, des émissions de CO2, des polluants locaux et particules.
L’électrification entraîne un changement en profondeur des chaînes de valeur automobile. L’intérêt général est clairement de soutenir une production locale de batterie à la fois sur le plan social (conserver l’emploi) et sur le plan environnemental (limiter les transports de marchandises).
La batterie européenne doit en revanche être exemplaire. Nous pensons qu’il faut assurer la traçabilité des matériaux utilisés, garantir les niveaux d’émissions les plus faibles possibles dans les phases de fabrication et surtout prévoir d’entrée de jeu le recyclage et la seconde vie des batteries. Les industriels doivent, dès maintenant, trouver des solutions viables pour les déchets de fabrication et les batteries en fin de vie ».
Concernant précisément l’installation de l’usine de Douvrin, le projet répond à une nécessité de développer la structuration de cette nouvelle filière dans les Hauts-de-France avec une importance qui doit être donnée à l’écoconception, la fabrication et le réemploi des batteries en fin de vie. Cette transition doit permettre de créer des emplois durables et non délocalisables.
EELV-NPDC est donc favorable à la création de cette filière et notamment d’une usine de fabrication sur le site de Douvrin. Toutefois et à la suite des différents rapports et études qui ont été menés, nous attirons l’attention sur plusieurs problématiques qui n’ont pas été réglées et pour lesquelles les réponses du constructeur ne sont pas satisfaisantes :
1) Concernant l’utilisation de la ressource en eau et en référence à l’avis délibéré de la mission régionale d’autorité environnementale Hauts-de-France, nous alertons sur les risques pris aujourd’hui pour préserver et protéger la ressource en eau.
A ce jour, les études d’impact ne tiennent compte que de la première unité de fabrication (deux autres doivent être construites) . L’autorité environnementale demande aussi l’étude de l’impact quantitatif des prélèvements en eau « industrielle » dans le canal sur l’ensemble du réseau hydrographique et de ses dépendances (nappes phréatiques, zones humides amont et aval), ainsi que sur les autres usages (autres industries, agriculture, navigation) en prenant en compte l’impact du changement climatique sur la ressource en eau. De la même manière cette autorité environnementale recommande de préciser les mesures envisagées en cas de sécheresse ou de baisse de l’approvisionnement en eau potable et « industrielle » pour assurer à la fois le bon fonctionnement du site, sa sécurité incendie, et l’approvisionnement des personnels.
Enfin l’autorité environnementale recommande de quantifier et d’analyser les effets du changement climatique sur le projet et réciproquement.
2) Concernant l’empreinte écologique du projet, le dossier du constructeur ne présente pas la provenance des matériaux utilisés ni l’impact de cette extraction. Dans le cadre d’une réflexion globale sur l’impact de la production des batteries, de la source au déchet et à son traitement, cette étude serait des plus utiles pour mettre en évidence l’intérêt de cette technologie. Cela pourrait être réalisé grâce à une étude de l’empreinte écologique du projet intégrant un bilan carbone par exemple avec les éléments présentés sur le cycle de vie d’une batterie automobile. Nous demandons donc avec l’autorité environnementale la mise en œuvre d’une étude d’empreinte écologique globale du projet.
3) Au niveau social et suite aux questions posées par les garants de la Commission Nationale du Débat Public (CNDP) lors de la concertation publique, nous souhaitons des réponses plus précises sur les engagements de chacun (Etat /collectivités/constructeur) pour garantir la création d’emplois durables, pour faire de ce projet et de sa mise en œuvre un laboratoire de la Transition Juste.
Pour ce faire, nous souhaitons que soit mis en perspective la filière intégrée sur le territoire avec les conséquences sur l’emploi de cette transition industrielle pour les différents partenaires et sous-traitants impactés afin d’en faire une véritable chaîne de valeur intégrée en richesse et en savoir-faire.
Nous demandons aussi des précisions sur la sécurité sanitaire des salarié.e.s qui seront exposé.e.s à des substances très dangereuses.
4) Concernant la poursuite de la concertation : comme demandé par les garants de la CNDP, nous demandons aussi la poursuite de la concertation avec l’ensemble des acteurs du projet afin de garantir la mise en œuvre des différentes mesures demandées et le suivi des réponses aux questions posées par les différentes études et instances. Nous demandons donc la création d’un comité de suivi permanent du projet qui associe les associations, les habitants et les partenaires industriels et institutionnels du projet.
5) Sécurité sanitaire et environnementale. Comme indiqué dans les différentes études et avis de l’autorité environnementale et de la CNDP, nous regrettons que le projet ne prenne en compte que la construction du premier bloc du projet pour ce qui concerne la sécurité sanitaire et environnementale du projet. Nous rappelons que cette usine se situe en grande proximité d’habitations et d’une école, dans une zone qui concentre des risques cumulés d’accidents : une canalisation de gaz en limite Est du site, une ligne électrique haute tension en limite Ouest, 17 autres ICPE (Installation Classée pour la Protection de l’Environnement) plus ou moins proches, dont un site Seveso seuil haut à 3km et deux sites Seveso seuil bas à 100 m. Par ailleurs il n’a pas été fait d’étude concernant le risque d’affaissement minier.
En conséquence et à la suite de l’autorité environnementale, nous demandons une étude des trois blocs de production prévus dans l’étude d’impact, l’étude de danger et l’étude sanitaire globale des risques qui permette de recouper ces données avec les risques technologiques générés par les sites voisins.
6) Filière de recyclage : Enfin et c’est un point très important, le projet ne prend pas en compte dans sa phase actuelle la nécessaire émergence d’une filière de recyclage des batteries. Même si la Région Hauts-de-France a lancé un appel d’intérêt pour lancer ce processus et au vu de la part très importante des financements publics prévus dans ce projet, nous demandons que chaque usine de fabrication de batterie, et donc celle de Douvrin, intègre dans son processus de fabrication le recyclage et le réemploi des batteries fabriquées.
En conclusion, EELV-NPDC est favorable à l’implantation de l’usine de Douvrin sous réserve des conditions rappelées ci-dessus, à savoir le respect de la protection des ressources en eau ; la prise en compte de l’empreinte écologique globale du projet ; des garanties sur la création d’emplois durables dans l’entreprise et dans l’ensemble de la filière sur le territoire ; la poursuite de la concertation ; une étude globale et approfondie sur les risques sanitaires et environnementaux et l’intégration dans le projet d’un processus de recyclage/réemploi des batteries fabriquées.
Nous demandons que les investissements, très importants de l’Etat et des collectivités territoriales soient conditionnés au respect de ces conditions avec un suivi garanti par le comité de suivi à toutes les étapes du projet.